UNEA-7 : S’unir pour une planète résiliente face aux défis de gouvernance en Afrique

Du 08 au 12 décembre 2025, Nairobi accueille la septième Assemblée des Nations Unies pour l’environnement (UNEA-7), un rendez-vous mondial crucial pour répondre à l’urgence écologique. Le thème choisi « Faire progresser des solutions durables pour une planète résiliente » reflète bien l’inquiétude générale : comment protéger la planète dans un monde de plus en plus vulnérable ? Mais une question dérangeante s’impose : comment avancer vers des solutions réellement durables si l’ordre politique et économique hérité du lendemain des indépendances africaines continue d’orienter ou de bloquer la gouvernance climatique ? Le cas des tourbières du bassin du Congo, leur richesse écologique mais aussi les menaces qui pèsent sur elles, en est une illustration frappante.

Philippe Assompi

11/27/20253 min read

Les ambitions de l’UNEA-7 : un espoir pour la planète

L’UNEA-7 représente une grande opportunité. Les pays du monde entier y discutent des mesures à prendre pour réduire le réchauffement climatique, protéger la nature et limiter les pollutions. On y parle aussi d’innovation, d’intelligence artificielle au service de l’écologie, et de la nécessité d’impliquer davantage les populations.

Sur le papier, l’assemblée porte une promesse : trouver ensemble des solutions pour que la planète puisse résister aux crises à venir.

Mais ces bonnes intentions se heurtent parfois à une réalité bien différente, surtout en Afrique centrale.

Les tourbières du Congo : trésor climatique, mais gouvernance en crise

Les tourbières du bassin du Congo sont souvent méconnues, pourtant elles sont essentielles. Elles stockent depuis des milliers d’années des milliards de tonnes de carbone : un rôle déterminant pour ralentir le réchauffement de la planète.

Mais ce trésor naturel est menacé.

Dans plusieurs enquêtes publiées sur Sauvons les tourbières du Congo, on découvre que :

  • Les communautés locales manquent d’information et de protection, alors même qu’elles vivent depuis toujours sur ces terres.

  • Les élites politiques et certains investisseurs internationaux profitent des failles de gouvernance, ce qui fragilise la protection des tourbières.

  • Des projets dits “écologiques” servent parfois de façade, masquant des pratiques d’accaparement de terres ou de greenwashing.

On est loin de la justice climatique défendue lors des grands sommets internationaux.

Quand l’héritage post-colonial freine la gouvernance du climat

Ces dérives ne sont pas des accidents isolés. Elles s’enracinent dans un système hérité de l’histoire :

faible reconnaissance des droits fonciers des communautés,

dépendance économique vis-à-vis des grandes puissances,

structures étatiques fragiles, parfois traversées par la corruption,

coopérations internationales inégales, où les intérêts du Nord dominent encore les priorités du Sud.

Dans ce contexte, les populations locales, pourtant premières gardiennes de la nature, restent souvent exclues des décisions.

Résultat : au lieu de renforcer la résilience de la planète, certains projets aggravent les injustices et fragilisent les écosystèmes.

L’article « Climat : réchauffement de la planète et colonisation » souligne d’ailleurs comment certaines grandes puissances continuent de jouer un double jeu : discours écologiques à l’international, mais soutien à des pratiques extractives sur le terrain.

Comment alors parler de « solutions durables » si les règles du jeu restent celles d’hier ?

Pour une vraie résilience : écouter les peuples, revoir les priorités

Si l’UNEA-7 veut réellement contribuer à un monde plus résilient, plusieurs changements sont nécessaires :

1. Redonner du pouvoir aux communautés locales

Les populations qui vivent sur les terres doivent être partie prenante des décisions. Pas juste consultées : réellement impliquées et reconnues comme co-gestionnaires.

2. Garantir la transparence des projets environnementaux

Les projets carbone, les contrats forestiers ou miniers doivent être accessibles au public. Sans transparence, il n’y a pas de confiance ni de justice.

3. Mettre fin au greenwashing

Planter des arbres pour compenser des tonnes de CO₂ émises ailleurs ne résout pas la crise climatique. La priorité doit être la réduction des émissions, pas leur maquillage.

4. Repenser les relations internationales

Pour que l’Afrique puisse protéger ses écosystèmes, elle doit pouvoir s’appuyer sur des partenariats équitables, qui ne reproduisent pas les logiques de domination du passé.

C’est précisément dans cette perspective que l’Organisation pour la Protection, la Préservation et la Promotion de l’Écosystème des Tourbières du Bassin du Congo (OPET-BC) plaide pour la création d’un fonds onusien dédié, directement géré par la société civile congolaise. Une telle approche garantirait enfin que les ressources destinées à la protection des tourbières profitent réellement aux communautés locales et non aux logiques de domination ou aux intérêts extérieurs.

L’UNEA-7 arrive à un moment décisif pour l’avenir de la planète. Le thème choisi, la résilience nous rappelle que nous devons non seulement protéger la nature, mais aussi garantir la justice sociale et le respect des peuples qui en dépendent.

Les tourbières du bassin du Congo montrent que l’avenir climatique du monde ne se joue pas seulement dans les grandes conférences, mais aussi dans la manière dont on respecte les territoires, les cultures et les droits des communautés.

Si l’ordre post-colonial continue de façonner les décisions climatiques, aucune solution ne sera véritablement durable. Si, au contraire, les peuples sont au cœur de la gouvernance, alors l’Afrique et le monde pourront réellement bâtir une planète résiliente.

Philippe Assompi

Président de l'OPET-BC